« Projet de Feuille de route – stratégie nationale de déploiement du Très Haut Débit – par Antoine DARODES
Antoine Darodes, dirige cette mission.
Télécharger le projet de « feuille de route » pour une stratégie nationale du déploiement du très haut débit soumise aux acteurs (opérateurs télécom, collectivités locales, associations ….) depuis mi janvier 2013.
Le gouvernement souhaite que les opérateurs privés actualisent à l’échellon local les déclarations d’intentions d’investir (suite à l’AMII de janvier 2011 – note d’analyse des engagements actuels) pour pour permettre aux collectivités territoriales de déterminer à l’échelle du pilotage de l’aménagement numérique local (par département à minima) les engagements sous 3 ans de desserte fibre optique des FAI. Ces déclarations seront consignées à travers des « Conventions de Programmation et de Suivi des Déploiements (CPSD) », que les opérateurs devront respecter. A défaut, les collectivités pourraient y compris dans ces zones AMII intervenir avec l’aide de l’Etat.
Questions à Antoine Darodes, directeur de la Mission Très Haut Débit confiée par les ministres Arnaud Montebourg, Fleur Pellerin et Cécile Duflot
Depuis le 9 novembre vous êtes à la tête d’une mission dédiée au déploiement du très-haut-débit en France. Comment est composée votre équipe ? J’ai consacré les premiers jours qui ont suivi l’annonce de ma nomination à organiser mon départ de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes où j’étais en charge de la direction des marchés haut/très haut débit et des relations avec les collectivités territoriales afin de me consacrer pleinement à la mission qui m’est confiée par le gouvernement. A court terme, l’équipe devrait être constituée d’une demi-douzaine de personnes et sera complétée ultérieurement en fonction des besoins. Je vais m’entourer d’une poignée d’experts qui connaissent parfaitement les enjeux et dont la diversité d’origine permettra de mieux appréhender la réalité des problématiques. Le recrutement de personnes qui ont déjà porté des projets de réseaux d’initiative publique au sein de collectivités territoriales permettra de construire une feuille de route opérationnelle et qui répond aussi aux attentes des élus. L’objectif de très court terme de la mission est de proposer de manière concrète et précise les éléments d’une feuille de route (organisationnels et financiers notamment) qu’il appartiendra au Gouvernement d’arbitrer ; il s’agit de rassembler rapidement et de manière cohérente les bonnes pièces d’un puzzle aujourd’hui éparpillées. Au-delà de cette première phase, la mission a vocation à assurer le pilotage opérationnel de la mise en œuvre de la feuille de route qui aura été déterminée lors du séminaire gouvernemental de février prochain.
Comment se déroule votre agenda ? Quand devez-vous rendre vos conclusions ?
Dans les tous prochains jours, la mission proposera aux ministres concernés un projet de document qui exposera un certain nombre de propositions très concrètes et d’évaluations financières précises. Ce document sera ensuite soumis à la consultation de tous les acteurs impliqués dans ce grand projet du très haut débit, et notamment les élus, les collectivités territoriales, les opérateurs et les équipementiers. La mission rencontrera alors les parties prenantes pour tenir le plus grand compte des observations, des critiques et des propositions d’amendements suggérées. Cette phase de concertation pourrait s’achever par une table ronde similaire à celle qui s’est tenue à la fin du mois de juillet.
L’objectif est d’avoir un projet de feuille de route finalisé à la fin du mois de janvier afin que le séminaire gouvernemental sur le numérique annoncé pour le mois de février puisse rendre les arbitrages et lancer ainsi la phase opérationnelle du plan.
Quels sont les objectifs que vous a fixé le gouvernement ? Les jugez-vous réalistes ?
L’objectif est clair. Il s’agit d’un engagement pris par le Président de la République : organiser avec les collectivités territoriales et l’industrie, la couverture intégrale de la France en très haut débit d’ici à dix ans.
Bien évidemment, un tel objectif à dix ans ne signifie pas que nous resterons dans un tunnel en attendant 2022. L’urgence de certaines situations impose que le chemin dessiné pour atteindre l’objectif final apporte des solutions rapides, fondamentales tant pour la compétitivité de nos entreprises, l’efficacité de nos services publics et la cohésion de nos territoires.
Si j’ai accepté cette mission, c’est que cet objectif me semble réaliste, tout en étant très ambitieux. Cela signifie que nous aurons besoin de nous appuyer sur l’ensemble des énergies et de mobiliser l’ensemble des compétences pour réussir un tel défi. L’objectif repose sur une volonté politique claire. Une méthode pragmatique guidera le chemin pour y parvenir.
Plus concrètement, comment comptez-vous assurer le suivi des investissements et faire respecter les engagements de déploiement des opérateurs ?
C’est effectivement une question très importante. Il convient de rompre avec la logique qui a prévalu jusqu’alors qui consistait à cantonner la politique d’aménagement numérique du territoire en fonction de simples « intentions » formulées par les opérateurs. La politique publique ne doit plus être dépendante, de manière passive, du bon vouloir des opérateurs. Dans le même temps, il est indéniable que la réussite de l’immense défi qui est devant nous ne pourra se faire qu’en s’appuyant notamment, sur les compétences, l’expérience et les investissements des opérateurs.
Cette nouvelle approche invite donc à mettre en place des relations de véritables partenariats, exigeants mais équilibrés, avec les opérateurs, dans lesquels les déploiements des opérateurs sont pleinement pris en compte mais dans la mesure où ils contribuent effectivement à la réalisation d’un objectif politique national.
Concrètement, il s’agit essentiellement de renforcer de manière substantielle les mécanismes de conventionnements et surtout de ne pas laisser les collectivités seules face à des opérateurs qui ne tiendraient pas leurs engagements. Des observatoires de suivi des déploiements et des procédures précises de caractérisation des manquements pourraient ainsi être mis à la disposition des collectivités territoriales. Ces conventions doivent également permettre de structurer l’action des collectivités territoriales pour faciliter les déploiements. La logique d’un gagnant-gagnant équilibré implique que chacune des parties fasse son bout de chemin.
Vous dirigez le pilotage national du plan très-haut-débit qui exprime la volonté du gouvernement de reprendre la main sur ce dossier. Que pensez-vous du projet de loi des sénateurs Maurey et Leroy qui vient d’être rejeté en commission à l’Assemblée nationale ? Les collectivités n’ont-elles pas un rôle à jouer lorsque les opérateurs s’avèrent trop lent à mettre en place le très-haut-débit ?
Comme l’a souligné la ministre Fleur Pellerin lors des débats à l’Assemblée nationale, depuis le vote du Sénat sur la PPL, le nouveau gouvernement a fait de l’aménagement numérique du territoire une priorité et nombre des objectifs poursuivis par cette proposition de loi sont au cœur de ce que le gouvernement s’est lui-même assigné. Dès lors, il apparaît plus efficace que les mesures pertinentes envisagées par cette proposition de loi soient intégrées dans le plan gouvernemental qui sera arrêté en février prochain. Le travail constructif de l’ensemble des parlementaires tant de la majorité que de l’opposition constitue assurément un solide socle pour le document en cours de préparation par la mission.
Propos recueillis par Joseph d’Arrast source : site CPN